Un faux site dâinformation usurpant Le Monde incite les internautes Ă donner leurs donnĂ©es personnelles, afin de recevoir gratuitement un iPhone. Cette technique bien connue des arnaques sur Internet franchit toutefois un nouveau pallier en termes de rĂ©alisme.
Quand câest trop beau pour ĂȘtre vrai, câest souvent une arnaque. Ne vous faites pas avoir par cet article en ligne du Monde qui se diffuse actuellement via Facebook et Ă©voque une opĂ©ration dâenvois gratuits de 10.000 modĂšles rĂ©cents dâiPhone non endommagĂ©s, suite Ă lâincendie dâun entrepĂŽt de stockage de la marque Apple. Une vague histoire dâune clause du contrat dâassurance de lâentrepĂŽt est utilisĂ©e pour justifier cette gĂ©nĂ©reuse opĂ©ration. Cet article est hĂ©bergĂ© sur un site imitant avec rĂ©alisme celui du quotidien et plus prĂ©cisĂ©ment sa rubrique Pixels, spĂ©cialisĂ©e dans les nouvelles technologies. Lâarnaque a pour but dâamener les internautes Ă renseigner leurs informations personnelles : prĂ©nom, nom, adresse, tĂ©lĂ©phone et e-mail.
Ce type dâarnaque est trĂšs rĂ©pandu sur Internet et sâappuie sur les faiblesses de lâalgorithme de Facebook. Des personnes mal intentionnĂ©es crĂ©ent un site imitant un mĂ©dia sĂ©rieux, Ă©crivent un article prĂ©texte quâils relaient sous forme de contenu sponsorisĂ© et utilisent la fonction permettant de booster leur visibilitĂ© sur le rĂ©seau social.
Le post frauduleux posté sur Facebook avec la mention « sponsorisée » :

Le cas qui nous intĂ©resse aujourdâhui franchit un seuil supĂ©rieur, en imitant quasi-parfaitement le site du Monde. LâURL ne trompera pas les lecteurs attentifs (www.le-monde-ici.fun) et lâarticle est Ă©maillĂ© de plusieurs fautes dâorthographe. NĂ©anmoins, jamais nous nâavions constatĂ© une tentative aussi bien conçue.
Des donnĂ©es rĂ©cupĂ©rĂ©es par des centres dâappels frauduleux
Les informations personnelles sont souvent rĂ©cupĂ©rĂ©es par des centres dâappels situĂ©s Ă lâĂ©tranger. Ces derniers entrent ensuite en contact avec les potentielles victimes. Commence alors une sĂ©quence de manipulation psychologique pour les inciter Ă envoyer de lâargent, en prĂ©textant des frais annexes, tels que des frais de port. Ils utilisent souvent des numĂ©ros dĂ©localisĂ©s pour faire croire quâils appellent depuis la France. Ici, on peut parler âdâarnaque Ă lâiPhoneâ, mais la technique est utilisĂ©e depuis plusieurs annĂ©es sur des actifs en vogue (diamants, forex, bitcoin, etc.).
Selon de nombreux spĂ©cialistes en fraude financiĂšre, les centres dâappels sont souvent installĂ©s Ă Ramat Gan, une ville israĂ©lienne en bordure de Tel-Aviv. Cela sâexplique en partie car lâĂtat dâIsraĂ«l a la particularitĂ© de ne pas pratiquer lâextradition sur ses ressortissants. Les malfaiteurs font le maximum pour brouiller les pistes : les fonds quâils parviennent Ă extorquer sont envoyĂ©s vers les pays de lâEst, avant dâĂȘtre rapidement transfĂ©rĂ©s vers des destinations exotiques comme le Moyen-Orient, DubaĂŻ ou IsraĂ«l. Une fois le larcin accompli, il est quasiment impossible de retrouver ses fonds.
Le Parquet de Paris et les rĂ©gulateurs financiers (AutoritĂ© des marchĂ©s financiers et lâAutoritĂ© de contrĂŽle prudentiel et de rĂ©solution) ont dĂ©clarĂ© le 17 septembre que la perte pour les Ă©pargnants victimes dâescroqueries financiĂšres a Ă©tĂ© Ă©valuĂ©e Ă âau moins un milliard dâeurosâ, entre le dĂ©but du mois de juillet 2017 et la fin juin 2019. Le rapport Ă©voque des sites bien documentĂ©s, souvent Ă©phĂ©mĂšres, qui prĂ©sentent une âapparence de sĂ©rieuxâ, sous leur caractĂšre fictif. Le montant des pertes est probablement sous-Ă©valuĂ©, Ă©tant donnĂ© quâil est basĂ© sur les plaintes des victimes. Or, dans le cas dâarnaques, les victimes sont souvent honteuses et nâosent faire Ă©tat du tour qui leur a Ă©tĂ© jouĂ©.
Sur la prolifĂ©ration de ce type dâarnaque, Facebook explique que les publicitĂ©s et pages qui contreviennent aux conditions dâutilisation du rĂ©seau social sont supprimĂ©s quand elles sont notifiĂ©es aux Ă©quipes. « Nous travaillons constamment Ă lâamĂ©lioration du repĂ©rage des arnaques sur nos plateformes« , explique un porte-parole. Câest la plupart du temps trop tard : lâopĂ©ration « iPhone gratuit » devait se terminer mercredi 18 juin au matin.